De la philatélie sans mettre son banquier en émoi
Combien de fois n'ai-je lu ou entendu que la philatélie était une affaire d'argent, autrement dit qu'il fallait un portefeuille généreusement garni si l'on voulait se bâtir une collection de timbres sérieuse.
Or, le lien entre moyens financiers et philatélie est en partie discutable. Je ne prendrai que deux exemples :
- est-ce de la philatélie que d'acheter en vente sur offres un " Orphelins 5 francs + 5 francs ", n° 155 du catalogue, certes neuf sans charnière pour ceux que cela concerne, pour la modique somme de 2 000 € ? Pour ma part, je répondrais sans ambages NON
- est-ce de la philatélie que d'acheter au gré de ses recherches un petit timbre de rien du tout, archi-courant, mais utilisé sur document dans un contexte particulier et d'essayer de rassembler différents cas d'utilisation de ce timbre archi-courant ? Il est évident que je répondrais par l'affirmative à la question " Est-ce de la philatélie ? "
Illustrons maintenant notre propos. Voici un timbre que vous connaissez déjà : le n° 11 de quittances (voir tag quittances ci-contre)
Utilisé pendant de très nombreuses années, ce timbre de quittances fait partie de ceux que je désigne sous le vocable " archi-courant ".
Intéressons-nous ensuite à un cas particulier d'utilisation de ce n° 11 : la taxation " graduée " des quittances mise en place par la loi de finances du 15 juillet 1915 qui, dans son article 28, dispose que le droit de timbre de 10 centimes auquel sont soumis, en vertu de l'article 18 de la loi du 23 août 1871, les titres emportant libération, reçu ou décharge de sommes, est élevé :
à 20 centimes pour les sommes supérieures à 200 fr., mais n'excédant pas 500 fr.
à 30 centimes pour les sommes supérieures à 500 fr., mais n'excédant pas 1.000 fr.
à 40 centimes pour les sommes supérieures à 1.000 fr., mais n'excédant pas 3.000 fr.
à 50 centimes pour les sommes supérieures à 3.000 fr.
Mais, suite à des maladresses de l'Administration, la mise en circulation des timbres à utiliser dans le cadre de ce nouveau tarif fut retardée. C'est pourquoi, on eut recours temporairement au n° 11 de quittances, grosso-modo entre juillet 1914 et juin 1915, pour réaliser les montants exigibles.
On va donc pouvoir rencontrer notre n° 11 de quittances seul pour les montants inférieurs à 200 francs :
Reçu d'un montant de 24 francs, 15 mars 1915
et en combinaison pour les montants supérieurs à 200 francs soit :
20 centimes pour les sommes supérieures à 200 fr., mais n'excédant pas 500 fr.
Facture acquittée d'un montant de 234 francs, 30 juin 1915
30 centimes pour les sommes supérieures à 500 fr., mais n'excédant pas 1.000 fr.
Reçu d'un montant de 500 francs, 21 décembre 1914
Observation : notre plâtrier-fumiste aurait pu économiser 10 centimes et se contenter d'un montant à 20 centimes
on peut également rencontrer le n° 11 associé au timbre humide à 10 centimes :
Reçu d'un montant de 900 francs, 1er janvier 1915
40 centimes pour les sommes supérieures à 1.000 fr., mais n'excédant pas 3.000 fr.
Reçu d'un montant de 2012,50 francs, 17 mai 1915
50 centimes pour les sommes supérieures à 3.000 fr.
Reçu d'un montant de 6 000 francs, 27 septembre 1914
Au final, en recherchant ces différentes combinaisons, nous avons fait de la philatélie ; toutefois, fort heureusement, nous n'avons pas dépensé le centième de ce qu'a dépensé l'acheteur du 5 francs Orphelins évoqué en préambule de ce billet. Mais, comme dit l'expression consacrée : " Tous les goûts sont dans la nature ! "